Accueil > Médicaments > Pour une nouvelle gouvernance du médicament
Pour une nouvelle gouvernance du médicament
Réaction au deuxième rapport de l’IGAS
Première publication : mercredi 22 juin 2011,
par - Visites : 8195
Critiquer est une chose, proposer en est une autre. Je suis connu pour stigmatiser ici ou ailleurs les errances de notre gouvernance sanitaire. Pour une fois, je vais proposer des solutions concrètes pour sortir du chaos actuel. Nous avons vu avec l’affaire de la pioglitazone que les enseignements du Médiator n’ont pas été suivis d’effet, que les mêmes dysfonctionnements perdurent, avec les mêmes acteurs.
J’avais préparé cet article après mon audition par le Sénat, mais la parution du deuxième rapport de l’IGAS hier me conduit à le publier maintenant. Une chose me gêne : le terme "Experts internes", je vais tenter de vous expliquer pourquoi.
Lors de mon audition au Sénat le 17 mai 2011, dans le cadre des missions d’information sur le Médiator, j’avais transmis préalablement aux commissaires une réflexion sur une nouvelle gouvernance démocratique.
Ceux-ci ont été suffisamment intéressés par mes propositions pour m’entretenir longuement à leur sujet, comme vous pourrez le lire dans le compte-rendu publié sur le site du Sénat.
Voici le texte que j’avais remis aux sénateurs :
Je ne vais pas revenir sur les dysfonctionnements de l’industrie pharmaceutique, des autorités sanitaires ou de la presse. Ils ont été largement évoqués devant vous.
Il devait y avoir un “après Médiator”, ce n’est pas encore le cas. Les discussions autour du médicament Actos (pioglitazone), désormais disponibles en vidéo, montrent que peu de choses ont changé. Un médicament cancérigène et sans intérêt thérapeutique démontré n’est pas retiré du marché. Les raisons de cette non-suspension d’AMM, contre l’avis de la commission de pharmacovigilance, ne peuvent être liées à la protection des patients qui devrait être le seul objectif de l’AFSSAPS.
J’aimerais vous parler de façon plus générale de la façon dont nous gérons depuis quelques siècles la prise des décisions qui engagent la vie sociale. Il me semble que l’histoire pourrait être une source intéressante de réflexion pour l’avenir de la démocratie sanitaire, démocratie qui reste apparemment à construire.
La prise de décision est et doit être distincte de l’expertise
Le premier exemple est l’élaboration des lois. Historiquement, la gestion des lois était confiée à des experts des sujets concernés. Après la révolution française, ce sont les députés qui prennent en main l’appareil législatif. Certes, ils ont parfois des compétences dans le champ de la loi, mais ce ne sont pas les meilleurs connaisseurs du sujet. En revanche, ils auditionnent des experts susceptibles de les éclairer dans leur réflexion.
Il y a donc dans l’appareil législatif la mise en application d’une règle assez universelle dans les démocraties : la séparation de l’expertise et de la décision. Ceux qui élaborent les lois ne sont pas les experts, car en effet, un expert a souvent des conflits d’intérêts importants. Les députés sont des législateurs professionnels.
L’autre exemple est celui de la justice. Certaines décisions font jurisprudence et engagent donc l’avenir de nombreux concitoyens. Là encore, la décision est le fait de magistrats, voire de jurés totalement naïfs du domaine. Les experts sont auditionnés mais ne participent pas aux débats. Les magistrats sont des juristes professionnels.
Dans ces deux exemples, la séparation est nette entre l’expertise et la prise de décision. Je ne vois pas pourquoi il serait impossible de pratiquer ainsi dans le domaine sanitaire. Experts d’un côté, commissaires/décideurs de l’autre, voici un fonctionnement rôdé qui n’est pas très difficile à mettre en oeuvre.
Une solution pourrait consister à réhabiliter le terme et la fonction de sapiteur. Un sapiteur est un experts pointu de son domaine, qui apporte à un expert plus généraliste sa connaissance très fine d’un sujet limité. Dans le cadre de la politique du médicament, nous avons besoin :
De commissaires experts en pharmacologie, en toxicologie, en évaluation, en chimie, en physiopathologie. Ces commissaires doivent et peuvent être indépendants de l’industrie pharmaceutique. Ils élaborent les recommandations et/ou prennent les décisions sanitaires.
De sapiteurs spécialistes d’une pathologie, voire d’une classe médicamenteuse. Ils sont auditionnés par les commissaires, peuvent avoir des conflits d’intérêts déclarés, et ne participent pas aux décisions.
La double chambre
Revenons à nos deux exemples, législatif et juridique. Il existe dans les deux cas une double chambre, permettant de rectifier des erreurs de première instance, de laisser réagir les parties éventuellement lésées, et de prendre le temps de la réflexion.
Dans le cadre législatif, les sénateurs, héritiers du Conseil des Anciens de 1795, revoient la copie des députés. La navette parlementaire permet d’aplanir les imperfections des lois.
Dans le cadre juridique, les chambres d’appel permettent aux parties qui s’estiment lésées d’obtenir un deuxième jugement sur une décision contestée.
Ce principe, lui aussi assez universel, paraît pouvoir s’appliquer à la gouvernance sanitaire. Soit par une navette entre deux institutions distinctes, soit par la possibilité de faire appel (aussi bien côté industrie que côté soignants ou patients) d’une décision qui paraîtrait mal fondée. Garder l’équivalent de l’AFSSAPS et de la HAS pourrait permettre de leur faire jouer ce rôle bicaméral.
Dans ces deux instances, il est indispensable que les sapiteurs ne soient en aucun cas les décideurs. Ces derniers doivent être des professionnels de la décision médicale et rester au moins aussi indépendants d’intérêts privés que le sont les parlementaires et les juges...
L’élection
Les parlementaires sont élus. C’est un fondement de la démocratie. Il me semble qu’une des chambre sanitaire pourrait disposer de commissaires élus par les patients, et l’autre de commissaires élus par les soignants.
Les magistrats ne sont pas élus, mais se veulent farouchement indépendants des pouvoirs. C’est l’autre voie : celle d’un corps de commissaires sanitaires professionnels libre de liens avec les intérêts pharmaceutiques.
Expertise interne, un mauvais terme
J’avais déjà évoqué la nécessité de créer un corps de commissaires scientifiques indépendants fin 2010, dans une liste de propositions pour sauver l’assurance maladie.
Dans le rapport de l’IGAS, il est fait mention à partir de la page 17 de la nécessité de renforcer l’expertise interne. L’esprit est le même : prendre acte de la non-indépendance structurelle des experts externes, et créer un corps d’élite, d’effectif réduit, interne à l’Agence. Je ne peux qu’approuver cette recommandation. Néanmoins, le terme "expert interne" est mal choisi.
Le terme expert est étroitement associé à la finesse, à l’étroitesse de la connaissance. On est expert d’un sujet précis. C’est le cas des experts externes. Utiliser le même terme pour des commissaire et des sapiteurs est dangereux et source de confusion.
Les personnes qui vont être responsables de l’analyse des dossiers pharmaceutiques et des propositions de décisions à la tutelle sanitaire ne doivent pas être appelés experts. D’ailleurs, l’IGAS a la sagesse de recommander d’inclure dans les 20 commissaires des membres de la société civile qui ne seront donc pas des experts médicaux.
Il faut donc les appeler par le nom qui convient : ce sont des commissaires
"Personne chargée par une autorité supérieure d’exécuter en son nom des fonctions temporaires. Il vient du verbe latin (committere : envoyer en mission) et a donné « commission". (source Wikipedia - Voir aussi Littré)
Enfin, si le rapport de l’IGAS mentionne la nécessité de gérer la carrière des commissaires ayant terminé leurs fonctions à l’Agence, il ne précise pas que ceux-ci ne devront plus avoir de liens directs ou indirects avec l’industrie. Il me semble que ma proposition de prendre des personnalités proches de la retraite constituait une bonne solution.
Messages
16 mars 2012, 07:51, par nieya
bonjour,
le citoyen landa quelque peut soucieux de sa santé ou ayant un trt au long cour est bien conscient de la gestion opaque de la pharmaco vigilence.
Il est souvent confronté à la dangerosité du médicament, pour lui même ou pour un proche.
Pour ma part j’en fais les frais.
Handicapée pour multiples pb, je prenais un trt : nicorandil(ikorel,adancor).Le cardio m’a interrompu ce trt pour son danger..
Il se trouve que pour raison d’handicap je tenais scrupuleusement à jour tous les symptomes et les contacts médicaux.
A ce jour, bilan :
pb gastro intestinaux 7 mois après prise nicorandil allant de colite et maus d’estomac,saignements, jusqu’à douleurs violentes aux passage des aliments et des boissons ceci jusq’à il y a un mois(arret trt).
pb aux yeux,opération vessie déplorable avec pb surrinfection,pb buccaux...
Le pire étant qu’à la suite de la suspension de prise de nicorandil préconisée par mon cardio, j’ai opéré qqes recherches sur les effets secondaires de ce médicament, non seulement sur des sites de recherche médicale française ms également mondiaux.
A ce jour, ce médicament a été signalé comme causant de graves effets secondaires ayant ds certains cas entrainé la mort.
les anglo saxons ont depuis longtemps signifié ces risques, ms aussi l’inde, la corée.
Aujourd’hui la HAS quant’à elle semble attendre !!!
Sachant que les études rapportées sont des patients qui prenaient nicorandil depuis 2 ou 3 ans,que moi par contre je le prend depuis 10 ans, que de par mes recherches je me suis rendue comptes que je présentais à moi seule, les multiples conséquences rapportés par les différentes unités de recherche que j’ai consultées,
je voudrais savoir comment signaler mon cas auprès des organismes agréés mais aussi auprès de centre de vigilance médicament indépendants.
Je suis la preuve encore vivante de la multi toxicicité du nicorandil.
Je pense que vous êtes à même de me donner la marche à suivre, et les coordonées que je recherche.
En vous remerciant.
27 mars 2012, 12:51, par nieya
bonjour, suite du 16 mars,
le 20 mars ds un communiqué aux professionnels de santé l’affsap a enfin souligné les effets multiples secondaires du nicorandil.
Mais la question est la suivante comment les patients qui ont de multiples atteintes du à ce médicament vont ils être suivi après l’arret du trt.
c’est un travail fastidieux que de formuler et collecter ttes les informations correspondant à 10 ans de trt.
c’est aussi très couteux, car il faut alors recontacter les médecins et professeurs qui ont suivie le patient. Pour ma part en 1 mois d’arret nicorandil l’addition grimpe.
je voudrais également savoir si suite à déclaration à pharmacovigilance,les instances de santé se soucient du patient, ou si cette déclaration sert seulement à répertorier des cas cliniques pour donner des rapports statistiques ou pour l’illusion que le patient est protégé.
Nieya
16 mars 2012, 09:09, par Dominique Dupagne
Bonjour, les patients peuvent désormais déclarer directement les effets indésirables des médicaments aux autorités sanitaires. L’adresse ici.