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Qualité mon Q !

Pour une nouvelle approche de l’évaluation

Première publication : samedi 3 septembre 2016,
par Dominique Dupagne - Visites : 10971

Ce titre provocateur est celui de mon dernier livre, publié cet été chez BoD. Il dénonce les déviances managériales commises au nom de la Qualité (avec un grand Q). Si tenter de faire mieux est souvent une bonne idée, cette intention affichée est trop souvent dévoyée en outil de pouvoir, en machine à broyer l’Humain.

La Qualité, qu’elle se prénomme Démarche, Contrôle ou Assurance, vise à améliorer ce que nous produisons. La démarche est louable, et il arrive parfois qu’une Démarche Qualité intelligente atteigne son objectif. Malheureusement, dans la grande majorité des cas, elle se transforme en outil d’aliénation, de domination, et devient une maladie envahissante qui mène ses victimes à leur perte.

Cette Qualité dévoyée se nourrit de mots creux et fait vivre une armada d’organismes et de consultants. C’est tellement facile :

Dans ce petit livre, je tente de donner des clés pour comprendre et résister à la Qualité dominatrice.

Comprendre quels sont les déterminants de ce désastre permet d’éviter de sombrer dans la folie : vous comprendrez pourquoi les directions s’évertuent à mettre en place cette Qualité qui ne fonctionne pas. Il y a une logique derrière cette absurdité apparente. La majorité des dirigeants ne cherchent pas à diriger, mais à dominer, ce qui n’est pas du tout la même chose. Le dirigeant sert la production, le dominant sert sa carrière.
Expliquez en public devant votre patron que de nombreuses initiatives positives et efficaces ont été prises pendant ses vacances et il vous fera comprendre la différence entre ces deux verbes.

Résister en évitant à tout prix le choc frontal : la Qualité est auto-protégé par sa positivité ! "Comment peut-on être contre la Qualité ?". Il faut donc ruser pour la combattre, et utiliser en premier lieu l’humour, dont l’effet peut être dévastateur. C’est la raison pour laquelle le livre commence et se termine par un recueil d’histoires drôles, comme celle-ci :

Dans un bar à glaces faisant partie d’une célèbre chaîne commerciale, un client laisse tomber sa cuillère. Un serveur la remplace immédiatement par un couvert propre qu’il sort de la poche de son gilet.

Impressionné par une telle efficacité, le client l’interroge au moment de régler l’addition.
- “J’ai vu que vous portiez une cuillère sur vous, d’où vient cette excellente idée ?”
- “Eh bien monsieur, notre groupe s’est engagé dans la Démarche Qualité. En portant en permanence sur nous des cuillères propres, nous gagnons en efficacité.”
- “C’est très intelligent ! Mais pardonnez ma curiosité : je vois que vous avez tous un brin de laine noir qui dépasse de votre braguette, c’est aussi de la Qualité ?”
- “En effet monsieur ! Vous êtes très observateur ! En général, nous allons uriner une ou deux fois pendant notre service, et la nouvelle procédure Qualité-Hygiène nous impose de nous laver les mains pendant trois minutes, ce qui nous fait perdre du temps. Du coup, le département efficience nous a demandé d’attacher un brin de laine à notre verge ! Nous pouvons donc la sortir de notre pantalon sans la toucher et le lavage des mains n’est plus nécessaire !”
- “C’est brillant ! Mais…”
Le client réfléchit en fronçant les sourcils.
- “Mais comment faites-vous pour la remettre dans votre pantalon ?”
Le serveur se penche à son oreille, et lui répond à voix basse :
- “Je ne sais pas comment font les autres, mais moi, j’utilise la cuillère…”

La Qualité ne se combat pas, elle se ridiculise. Vous découvrirez les codes qui vous permettront de reconnaître sans vous dévoiler ceux qui ont également lu le livre, afin de mener des actions concertées.

Et si vous trouvez que j’exagère, que je suis trop sévère avec la Qualité, souvenez-vous de la définition de la grève du zèle : elle consiste à appliquer toutes les procédures Qualité, avec pour effet de bloquer totalement la production.

Une Démarche Qualité digne utile et efficace suppose deux conditions très difficiles à remplir :
- La direction et l’administration doivent fixer les objectifs puis se mettre au service de ceux qui produisent (et non le contraire) : "dites-nous ce dont vous avez besoin pour atteindre les objectifs, on va tout faire pour vous aider".
- Les dirigeants doivent être plus préoccupés par la réussite de l’entreprise que par la gestion de leur carrière, et choisir des cadres qui partagent la même vision du management.

Est-ce vraiment ce qui se passe dans votre entreprise ou votre administration ?

Le site du livre http://www.qualitemonq.com

Suite la semaine prochaine : Qualité 2.0 ! À quoi pourrait ressembler une approche intelligente de la Qualité !

Il y a 13 messages sur ce forum.

Messages

  • Et tu m’attaques suite à discussion sur twitter où je réponds violemment à une "pseudo" directrice d’hôpital (qui est dans les hautes sphères) alors que je ne fais que distribuer des baffes des pourfendeurs de la qualité et de la "bien-traitance" (soit-disant)… Pas compris.

    • Il y avait manifestement un malentendu

    • Désolé, je ne touïte point, ne vais point sur fessebouc.

      QU’estce que c’est que cette histoire de consentement pour les ß HCG ?

      Par ailleurs, l’ARS, l’HAS et autres autorités ont une méconnaissance totale de ce que les Zanglosaxos appellent "the law of unintended consequences" ou effets pervers.

      Ainsi par exemple une autorité non gauloise a imposé que les antibiotiques dans les pneumonies, devaient être edministrés dans les 4 h de l’arrivée aux urgence sinon : paf un grand coup sur les doigts !

      Bande de c...s ! Non seulement il n’existait pas de preuve que donner les ATB dans les 4 h améiore la mortalité ou autre critère signifiant, par rapport à 5-6 h , mais z’encore, en pressant ces crétins d’urgentistes inconséquents ils ont abouti à ce que (oui Madame, le diagnostic de pneumonie c’est aps toujours facile ! ) les urgentistes posent trop vite le diagnostic de pneumonie et traiteent par antibiotiques des non pneumonies. Génial.
      Je n’ai plus la référence sur mon ordi...
      De meme en voulant accélérer le délai "porte- salle de coro" devant une douleur thoracique on a dégradé le diagnostic et envoyé en salle de coro plus de dissections aortiques (publié qq part).
      Mais les maîtres du post hoc sur leur rond de cuir nous tiennent en respect !

      Les dominos vous dis-je !

    • je m’adressais à une folle dingue qui ne sait pas manifestement ni ce qu’est être soignant (et là dedans j’inclus le terme de soignant au sens large, du médecin, ide, as, secrétaire jusqu’au proche du patient dont on oublie parfois l’importance), folle dingue qui a en plus des fonctions importantes semble-t-il dans l’administration hospitalière dans ce qui ce fait de plus pernicieux pour la bonne prise en charge des patients.

  • votre video avec les fiches : ce serait bien que vous citiez la source. c’est un plagiat...
    vous voulez queles gens pensent que c’est vous qui avez inventé ca ? c’est juste une copie hein...

  • Bonjour, j’ai piqué dans un CR de votre livre ce passage qui m’a fait bondir (mentalement) de joie : « La Qualité procédurale, en niant la compétence en tant qu’élément principal de la qualité du travail, permet à un cadre ou un contrôleur de prendre l’ascendant sur des agents efficaces et expérimentés. C’est en fait son objectif principal, et masqué...". La suite ayant trait à la suspicion systématique à l’égard du dit agent "efficace et expérimenté", c’est une description parfaite de ce que j’encaisse dans mon travail d’universitaire et dans les hostos depuis 20 ans - avec dérision et humour, hein, on survit. Je crois que les termes "Qualité procédurale" sont d’une exactitude redoutable. Merci pour ce travail de réflexion.

    • Je vis la même chose dans mon travail. Le petit employé est toujours suspect dans les yeux du manager.

  • démonstration pertinente :

    l’administration se délecte de ces nouveaux mots à la mode :
    processus, indicateur, client, rentabilité, QVT (qualité de vie au travail)
    réunions participatives ....

  • Un bouquin top qui redonne le moral car cela fait toujours du bien quand on comprend mieux les choses ! Les dérives dans le monde du travail ne sont pas une fatalité, ouf ! Merci Dr. Dupagne pour cet ouvrage.

  • Merci pour cette réflexion impertinente et juste !
    Plus largement, cet asservissement progressif aux normes et aux procédures me fait penser à ce que le philosophe Jacques Ellul avait largement exploré et dénoncé comme "le système technicien", de façon plus sérieuse.
    Dans le domaine universitaire, quelques Belges plaident pour la "Désexcellence" :http://lac.ulb.ac.be/LAC/charte.html

    Cordialement,
    Aurélien infirmier

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