LES MÉDICAMENTS : cocktail explosif ou stabilisateur ?L’utilisation de médicaments en psychiatrie fait "jaser". Il y a du pour, il y a du contre, et il y a surtout des préjugés. On ne peut nier cependant que depuis 40 ans, la découverte de nouveaux médicaments a permis de réels progrès dans les traitements en santé mentale. Avant de porter un jugement sur les médicaments, il faut prendre le temps d’en connaître les différentes sortes. On comprendra alors mieux leur utilité.
Note : Les renseignements qui suivent sont d’ordre général. Pour plus de précisions, il faut toujours se référer au médecin traitant ou au pharmacien.
Les tranquilisants majeurs (antipsychotiques, neuroleptiques)
Ces médicaments servent à contrôler les hallucinations, l’agitation, les idées délirantes. Ils sont prescrits sous forme de comprimés ou d’injections. Voici les principaux utilisés : Largactil, Tarasan, Clozaril, Fluanxol, Moditen, Haldol, Loxapac, Nozinan, Trilafon, Orap, Mellaril, Navane, Stelazine, Modécate…
*** Note : La Clinique Le Faubourg Saint-Jean fait une étude clinique sur le Seroquel pour les personnes au prise avec le trouble de personnalité limite, car ce tranquilisant diminue l’impulsivité et le clivage et améliore un maintien en thérapie. Les doses sont moindres (de 50 à 200 mg en moyenne) que pour les troubles graves de schizophrénie et de psychose. Contrairement aux anxiolytiques, ce médicament ne crée pas de dépendance mais est un traitement à long terme. Il faut prévoir faire un sevrage de tout autre médicament pour participer à l’étude. _Boebey ***
Ces médicaments sont accompagnés souvent d’effets secondaires tels que : somnolence, baisse soudaine de tension artérielle au lever, vertiges et sensations de faiblesse, sécheresse de la bouche, vision brouillée, difficulté à uriner, constipation… Lorsqu’ils se produisent, il ne faut pas hésiter à contacter le médecin traitant ou le pharmacien pour se rassurer. Il faut noter que les effets secondaires tendent à disparaître après un certain temps.
Il peut aussi y avoir des effets extrapyramidaux : raideurs, tremblements, agitation, spasmes musculaires, lenteur. Ces symptômes requièrent d’autres médicaments, appelés antiparkinsoniens, pour neutraliser leurs effets : Cogentin, Kémadrin, Artane…
Les tranquilisants majeurs sont généralement utilisés pour les troubles graves tels que la schizophrénie et les psychoses. Ils demandent un suivi médical régulier.
Les antidépresseurs
Ces médicaments sont utilisés pour traiter la dépression grave et contrôler les comportements agités ou agressifs qui l’accompagnent. Il y en a trois sortes :
Le groupe des cycliques :
Elavil, Anafranil, Norpramin, Pertofranem Sinequan, Tofranil, Novopramine, Aventyl, Surmontil, Asendin, Ludiomil*, Désyrel*…
* Le Ludiomil et le Désyrel sont souvent classés dans cette catégorie, quoique leur composition n’est pas du même type.
Ils peuvent causer des effets secondaires tels que la sécheresse de la bouche, la vision brouillée, la somnolence, la constipation, la prise de poids, l’insomnie, les difficultés sexuelles, etc.
Le groupe de "nouvelle génération" inhibiteurs de recaptage de la sérotonine (IRS et dérivés) :
Dans ce groupe, on retrouve des médicaments qui ont été développés depuis une dizaine d’années. Les plus connus sont : Luvox, Prozac, Paxil, Serzone, Effexor, Zoloft… Plusieurs études sont en cours sur leur efficacité. Ces médicaments en agissant sur le recaptage de la sérotonine ouvriraient une voie intéressante dans le traitement des dépressions et des troubles obsessionnels.
Les principaux effets secondaires sont la nausée, les vomissements, l’anxiété, les maux de tête, la sécheresse de la bouche, la constipation, une sensation de faiblesse, etc. Normalement, ces effets secondaires s’atténuent et disparaissent avec le temps.
Le groupe des inhibiteurs de la monoamine-oxydase (IMAO et IRMA) : Nardil, Parnate, Manerix.
Ce sont les plus anciens antidépresseurs, les plus toxiques et les plus difficiles à utiliser.
Il faut éviter de consommer certains aliments tels le fromage et le vin et certains médicaments qui pourraient causer de l’hypertension grave, des palpitations cardiaques et des douleurs à la poitrine.
Les effets secondaires seraient les mêmes que pour les antidépresseurs cycliques, avec en plus des bourdonnements d’oreilles et de l’impuissance sexuelle. Le Nardil et le Parnate sont considérés comme le dernier choix en raison de l’importance de leurs effets secondaires.
Dans ce groupe, on doit signaler l’apparition du Manerix en 1992. C’est un médicament du même type mais peu toxique. Il constitue un bon choix de remplacement si les deux autres groupes ne conviennent pas à la personne.
En conclusion, il faut noter que les antidépresseurs prennent du temps à agir, soit de deux à trois semaines. Comme les autres médicaments en santé mentale, ils viennent compléter l’action d’autres traitements tels que la psychothérapie.
3. Les antimaniaques ou stabilisants de l’humeur
Ces médicaments sont utilisés pour traiter les personnes qui connaissent une période d’euphorie prolongée suivie d’une dépression grave. On parle alors souvent de maniaco-dépression ou de maladie bipolaire.
Les principaux médicaments utilisés sont : Carbolith, Lithane, Duralith (3 médicaments à base de lithium) Depakene et Tégrétol.
Les comprimés de lithium sont les plus souvent utilisés. Le lithium stabilise l’humeur de la personne, de sorte qu’elle puisse manger, dormir, penser et fonctionner normalement. Il prend plusieurs semaines à agir (deux à trois semaines). Lors d’une période de manie, on utilise, en complément au lithium, des anxiolytiques ou des antipsychotiques. Une fois la crise passée, la personne doit continuer de prendre le lithium, même lorsqu’elle se sent mieux, afin de prévenir d’autres crises.
Les effets secondaires sont surtout : tremblements, nausées, diarrhée, besoin fréquent d’uriner, prise de poids, sensation de soif et rétention d’eau. Le dosage du médicament se fait par prises de sang régulières. Il demande donc un suivi médical serré.
Le Depakene et le Tégrétol sont prescrits quand le lithium ne peut être utilisé et demandent eux aussi un suivi médical régulier.
4. Les anxiolytiques
Ces médicaments servent à soulager l’anxiété, relâcher les muscles et aider à dormir. Ils ont comme inconvénient principal de causer une dépendance lorsqu’ils sont utilisés plus de 6 mois. Consommés avec de l’alcool, ils peuvent produire des réactions graves, voire l’arrêt respiratoire.
Les anxiolytiques les plus connus sont : Xanax, Lectopam, Librium, Rivotril, Valium, Dalmane, Ativan, Serax, Restoril…
Ils ont comme effets secondaires : étourdissements, somnolence, perte de coordination musculaire, vision brouillée, agitation, pertes de mémoire, augmentation de l’appétit, diarrhée.
5. Conclusion
Il n’existe pas de médicament ni de traitement miracle. Les troubles de santé mentale peuvent avoir des sources autant biologiques, psychologiques que sociales. Il ne faut pas négliger un de ces aspects. Les médicaments ont un rôle à jouer pour rétablir un équilibre au niveau du système nerveux de la personne. Cela permet de diminuer l’état d’urgence et alors de pouvoir regarder les solutions qui s’offrent à elle.
Il existe une variété de médicaments, chacun a ses avantages et ses inconvénients. La personne ne doit pas hésiter à poser des questions au pharmacien, au médecin ou à l’infirmière. Ceci permettra d’ajuster les médicaments à ses besoins.
POUR EN SAVOIR PLUS :
BÉDARD, Marc-André
Médicaments psychiatriques, leur utilisation et effets secondaires,
Valleyfield, 1993, APAMM du Sud-Ouest
Les médicaments dans la maladie mentale :
Un guide régional destiné aux familles,
Association Canadienne pour la santé mentale,
Montréal, 1993, p. 53-59
Source : Vivre avec une personne qui souffre d’un trouble de santé mentale. Guide pratique à l’intention des familles.