Modifié le 22-05-03 à 17:55 (GMT) par D_Dupagne (admin)>- Sur quels critères cliniques (symptômes) évoquer une maladie de Lyme
>tardive, en dehors d'un historique érythème typique ?
Les symptômes peuvent être multiples, et étant donné le tropisme de la Bb (particulièrement garinii) pour le système nerveux (entre autres!), ressembler à de nombreuses autres pathologies. A mon avis, en absence de signes cliniques irréfutables comme l'ECM classique, ou probables comme une paralysie faciale unilatérale (paralysie de Bell) chez les enfants par exemple,le dx reposera plus sur une appréhension globale de l'historique et de la notion de "faisceaux de symptômes" convergents tous vers ce dx.
Ex: une personne ayant (ou ayant eu) des contacts avec la nature qui se plaint de troubles cognitifs (difficultés de concentration, perte de mémoire à court terme), de céphalées ou de forts serrements ds la nuque, de douleurs musculaires et/ou articulaires (en particulier au niveau des jambes et des pieds), de troubles de la vision (trouble, double, yeux qui brûlent, photosensibilité, et même douleur du globe oculaire). La liste est pratiquement infinie mais on peut se souvenir des descriptions de la syphilis tertiaire. Certains gros nerfs craniens sont souvent touchés ce qui peut déclancher des douleurs au niveau de la tête mais également à distance.
On peut aussi constater des anomalies cardiaques, bradycardies/tachycardies, troubles du rythme, block AV etc.
La tension artérielle peut être basse, on peut constater une hypotension orthostatique etc etc.
Cette liste bien que longue est loin d'être exhaustive.
>- Quels tests sanguins réaliser exactement ?
C'est bien là où le bas blesse! Les sérologies classiques (type ELISA)peuvent être utiles mais elles ne sont fiables ni en sensibilité ni en spécificité, les malades chroniques les plus atteints auront fréquemment une sérologie négative (diverses raisons possibles).
Les Western Blot seraient plus fiables mais ils se basent eux aussi sur une détection des anticorps et de l'antigène utilisé, (la diversité des Borrélia Burgdorféri est telle qu'il est difficile d'être sûr d'avoir le bon test pour un cas particulier). Il semblerait même que les malades les plus atteints sont très souvent séronégatifs (ou faiblement positifs), alors que ceux qui ont une réponse immunitaire plus forte seraient à la fois moins malades et séropositifs! (apparemment les gens souffrant plutôt de douleurs articulaires type arthrite ont plus de chance d'avoir des sérologies positive ("meilleure" réponse immunitaire ou variété de Bb mieux détectée par les tests utilisés?).
En France, le test WB utilisé est par un kit Eurobio, on peut demander les IgGs et les IgMs. De nombreux labos en France l'utilisent. A Paris Pasteur Cerba par exemple.
Il existe aussi des tests par PCRs mais ils sont très peu sensibles surtout sur des prélèvements sanguin (la Bb ne circulant pas très souvent ds le sang). Ils sont cependant très spécifiques et sont très utiles quand ils sont positifs (d'aucuns vous diront qu'une PCR d'ADN peut vouloir dire infection ancienne et résolue, je n'y crois pas trop qd on est en présence d'un tableau clinique archi évocateur d'un Lyme). Le problème est plutôt dans le sens faux négatifs.
On peut également constater certaines anomalies sur les numérations de routine et sur les tests de fonction hépatique (mais le plus souvent ce sont des anomalies discrètes qui n'auront pas alertés les médecins consultés précédemment). Ces anomalies (leuconeutropénies, légère anémie, baisse des plaquettes indice d'anisocytose un peu haut, légère éosinophilie etc) se remarqueront plus souvent chez les malades qui ont aussi des co-infections (autres bactéries ou protozoaires également transmises par les tiques comme la Babésia, certaines Rickettsies, et il est maintenant décrit que des Bartonella peuvent aussi compliquer le tableau!!)
On peut constater des hypothyroidies discrètes (même des anticorps autoimmuns qui peuvent faire penser à des pathologies auto immune comme Hashimoto), des températures basses (35°, 36°) ou au contraire des poussées fébriles (surtout avec la Babésia).
Les patients se plaignent souvent d'épisodes de type grippaux larvés mais récurrents, certains ont ces symptômes avec une périodicité réguliere, d'autres non.
>- Comment confirmer le diagnostic ?
Voir plus haut ET à mon avis la meilleure confirmation est par un essai d'antibiothérapie (après que les prélèvements aient été faits, sang, biopsies, si lésion cutanée, liquide synovial etc.)
Les abx les plus utilisés sont les pénicillines ou céphalosporines de 3e génération (Ceftriaxone IV si atteintes cardiaques ou neuroborréliose), et la doxycycline (pour adultes et enfants de plus de huit ans).
Mais les traitements des "vieux" Lymes compliqués peuvent être un vrai cauchemar pour médecin et surtout patient. Il n'y a pas de chemin balisé. Il faut naviguer à vue, les antibiotiques peuvent avec la lyse des bactéries provoquer ce qui semble être une aggravation des symptômes (effet Jarish-Herxheimer).
Le domaine (devrai-je dire l'"univers") de la maladie de Lyme est un véritable champ de bataille aux USA et deux camps s'opposent férocement. Le choix, la durée, le mode d'administration des traitements est un sujet plus que sensible ds un pays où les compagnies d'assurance privées font la loi, où les médecins sont traqués de tous côtés si d'aventure leur venait l'envie de traiter leur malades selon leurs convictions.
>- Après une période de sous-diagnostic, comment éviter un sur-diagnostic par
>effet de mode ?
Je n'ose même pas répondre à cette question! Cette maladie est grossièrement sous-diagnostiquée, très mal décrite car extrêmement complexe. Aux USA, elle a longtemps été considérée comme le domaine réservé des rhumatologues (d'ailleurs ne l'avaient-ils pas "découverte" sous le nom "d'arthrite de Lyme".
De plus il est important de comprendre que par "maladie de Lyme" on comprend souvent Borréliose alors que les autres infections transmises par la même morsure de tique jouent parfois un rôle prépondérant ds la symptomatologie rendant le tableau clinique encore plus confus.
Il existe aussi des synergies entre ces différents pathogènes qui font que ni la Babésia ni la Borrélia (pour ne prendre que cette combinaison) ne vont se comporter comme la description qui est faite classiquement ni de l'une ni de l'autre.
Bien évidemment, comme dans toute pathologie avec des symptômes aussi nombreux et où il y a un déficit au niveau des tests dits objectifs, on peut imaginer qu'on peut finir par "voir des Lymes partout".
Nelly