Bonjour, Mon message contient un aspect neurologique et psychique. J'ai eu une
syncope de environ 3mn suivi par un etat de demi-conscience de qques
heures (la plupart du temps inconsciente, plus aucune notion ni
d'espace, ni de temps, ni aucune sensation corporelle, mais capable
d'entendre parfois et meme de repondre en style telegraphique). Quatre
mois et demi plus tard il me reste encore un choc mental assez fort,
du aux trous de neant que cela a laisse dans ma memoire, mais aussi
au fait que je me suis vu "traverser le passage". Les sequelles "physiques"
sont tres faibles et tendent a disparaitre. Quelques legers vertiges,
un grand malaise dans la penombre alors que de toute ma vie je n'ai jamais
eu peur du noir, me retrouver comme une fleur a 160 sur l'autoroute sans
broncher alors que j'ai toujours deteste la vitesse. Rien de grave. Je
cherche simplement d'autres personnes qui se seraient aussi evanouies
a cause de la douleur et qui en s'evanouissement auraient eu aussi des
images mentales fortes. J'aimerais partager mon tempoignage, ca m'aidera
peut-etre a mieux gerer, ca pourrait aussi aider d'autres personnes,
surtout celles qui n'ont meme pas compris qu'elles s'etaient evanouies.
Voici mon temoignage. Il semble que pour donner la vie j'ai tendance
a fleurter avec la mort. Une pre-eclampsie (attendue, hypotrophie) pour
ma premiere fille (20 de tension a la pose de la peridurale tout de meme),
puis un petit voyage dans les limbes pour ma deuxieme. J'ai eu un cas
de figure pas-le-bol, 17 heures de la premiere contraction ressentie
jusqu'a 2cm de dilatation, contractions tres irregulieres aussi bien
en intensite qu'en frequence. A ma deuxieme visite a l'hopital j'ai deja
eu des contractions fortes mais gerables, mais a nouveau les 40 premieres
minutes sont calmes, une vrai partie de campagne. Puis arrive une vague
de 3 contractions beaucoup plus fortes. La deuxieme est plus que limite.
J'ai ferme les yeux mais je ne le sais pas. Je m'ordonne deja de ne
plus bouger car (i) ne pas deranger le capteur cardiaque du bebe, (ii)
c'est encore pire si je bouge. J'ai un debut d'images mentales. La piece
n'a plus de plafond. Les murs s'ouvrent sur un espace infini et gris
(perte des couleurs). Au loin je vois un passage. Mais ca s'arrete, repos.
Puis vient la troisieme. La douleur est d'une telle violence que je
decolle tout de suite (ca a du venir chatouiller le nerf rachidien) dans
cet espace infiniment gris. Je n'ai pas meme le temps d'avoir peur. Je
vois mon corps foncer a une vitesse supersonique vers la porte du passage.
J'ai a peine le temps de penser "merde, je vais ou ?", et je la pulverise
literalement. Simultanement mon cerveau lance deux ordres, "resiste,
bouge plus". Ma derniere vision de l'espace est une puree de pois grise
dans laquelle je ne me vois plus. Ensuite ... rien, neant total. C'est
de toute evidence la revolte de mon estomac qui m'a reveillee a la fin
de la contraction. Cette contraction a dure 4mn, ce qui est bien sur
trop long (hypertonie). J'ai 10mn de conscience relative, mais je deconnecte immediatement a la contraction suivante. Pendant les 50mn
qui suivent je n'ai aucun souvenir, sauf la sensation d'une grande
souffrance continue. Mon mari me voit immobile et les yeux fermes, il
croit que je dort. Comme je suis en pre-travail la sage-femme ne passe
qu'une fois par heure et ne comprend pas. Elle finira par comprendre
que je souffre lorsqu'une autre contraction (dont je ne me souviens
absolument pas) provoquera une seconde revolte d'estomac, mais elle
ne comprend pas que je ne suis pas en etat d'eveil. Elle me fera donc
un derive morphinique qui dans mon vecu aura un effet bizarre, mais
c'est le seul moment pendant 4 heures ou je retrouve un sentiment de
continuite du temps. Sinon, de toute cette periode, il ne me reste
que des souvenirs brefs et ponctuels, meme pas dans l'ordre chronologique.
L'horreur me saisira 5 heures apres la syncope, quand la peridurale
commencera a agir, lorsque je me rend compte que pendant tout ce temps
je n'ai plus pense a mon bebe !
Il y a trois points fondamentaux dans tout cela. Le premier est que
je n'avais pas compris que j'etais tombe dans les pommes. J'ai passe
les huits premieres semaines a me traiter de douillette. Quand le fantome
de ces 4 heures est devenu obsessionel j'ai fini par admettre qu'il y
avait un reel probleme et je me suis interrogee. Les deux semaines
suivantes j'ai ecrit mes souvenirs. Finalement je me suis decidee a interroger la memoire de mon mari et les faits objectifs du dossier medical. Seulement la j'ai compris. Le second point fondamental c'est bien sur le choc du franchissement du passage de la conscience a l'inconscience. Meme si je ne risquais absolument pas de mourir, c'est tout de meme l'antichambre de la mort, les limbes. Le troisieme point, ce sont les
trous de neant non inscrits dans la trame de ma memoire. La douleur en
elle-meme, je ne referais pas ca tous les jours ..., mais je digere,
surtout pour donner la vie. Mais j'ai encore bien du mal avec le
choc neurologique-psychique.
Avez-vous vecu des choses similaires, et comment se sort-on de la
(avec le temps bien sur ...) ?
Cilou
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