A prendre le pouls de la profession auprès de mes confrères, en direct ou par listes de discussion interposées, j'ai l'impression qu'un grand bouleversement est en train de voir le jour.Depuis 20 ans, la surpopulation médicale rendait les médecins dépendants des caisses, qui solvabilisent leur clientèle. La concurrence entre médecins était rude et chacun pliait sous le joug conventionnel.
Les choses changent. Les honoraires bloqués, dont le montant devient ridicule, le ras-le-bol devant la montée concomitante des charges et l'apauvrissement qui s'ensuit vont sans doute pousser certains médecins à ruer dans les brancards.
La convention, après tout, n'est qu'un contrat signé entre un professionnel et un organisme payeur. Si le contrat n'est plus équitable et que la clientèle est nombreuse, il est tentant de voler de ses propres ailes et de de fixer ses tarifs soi même. A la clientèle de trouver des solutions pour payer.
Les propriétaires d'appartement ne se posent pas la question, au moment d'établir leur loyer, de savoir si l'allocation logement ou les revenus des locataires en couvrent le montant. Ils calculent leurs charges et déterminent un prix en fonction du marché.
Les dentistes et les opticiens se sont depuis longtemps déconnectés des tarifs conventionnels.
Le médecins vont bientôt faire de même. Ceux des campagnes parce que, de plus en plus seuls, il n'auront plus aucune concurrence. Ceux des villes parce que la clientèle est à même de comprendre qu'un médecin ne peut rester éternellement le réparateur le moins cher.
Les derniers à réaliser ce bouleversement seront sans doute les gestionnaires des caisses et les autorités de tutelle. Leur réveil sera douloureux, mais ce seront sans doute leurs successeurs qui devront affronter la situation explosive qu'ils n'ont pas su gérer.
Le médecine à deux vitesses est en marche. Rien ne devrait pouvoir l'arrêter. Quelle tristesse.
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Dr Dominique Dupagne