Bonjour à tousVoilà, çà fait quelque temps que je lis vos messages et il m'ont apportés beaucoup pour mieux comprendre la maldie dont souffre mon compagnon
Je viens d'écrire une lettre au psychiatre qui le suit à l'hôpital, pourriez vous me dire ce que vous en pensez et si je peux avoir l'espoir qu'il me recevra ou m'aiguillera même si j'ai vu dans ce Forum qu'ils sont tenus à une clause de confidentialité
Merci de tout coeur, c'est très important pour moi.
C., le 19 novembre 2003
Une bouteille à la mer
Docteur,
C’est une personne complètement désemparée et désespérée qui s’adresse à vous aujourd’hui.
Désespérée, oui, mais une personne pleine de rêves, d’espoirs et d’amour pour l’être qui compte le plus pour elle, plus qu’à sa vie elle-même.
Cela peut paraître démesuré pour certaines personnes puisque çà ne fait que quelques mois que nous vivons ensemble, mais vous conviendrez certainement que l’on peut vivre auprès de quelqu’un pendant des années et ne jamais être aussi sûr de ses sentiments, ni de ce que l’on souhaite pour notre avenir comme je le suis aujourd’hui.
Tout d’abord je tiens à préciser que je suis bien consciente de l’état de T… et que je l’étais bien avant que l’on vive ensemble. Je pense savoir de quel mal il souffre - je dis bien : « je pense » car je ne suis pas psychiatre, mais je ne lui dirais pas puisque ce n’est pas mon rôle. Je ne veux surtout pas jouer au thérapeute amateur et si personne de votre corps de métier – que je respecte - ne le lui a dit c’est qu’il doit y avoir une raison légitime ou un diagnostic difficile à prononcer.
Parfois il me dit que de mettre un nom sur son mal le rassurerait, moi j’ai cette appréhension, c’est vrai, qu’il ne s’arrête sur un nom qui fait peur et qu’il s’y enferme, puisque mal connu cette pathologie est mal comprise, on y englobe trop de choses. Je vais être claire, je pense à la schizophrénie. De mettre ce nom sur son mal ne me fait pas peur, je préfère savoir ce qu’il a pour appréhender l’avenir au mieux, j’ai pu me documenter pour mieux comprendre cette maladie. Le problème est que nulle part on ne nous parle de solutions, d’attitudes à adopter, du soutien que l’on peut obtenir.
Je suis réaliste sur ce « qu’est » cette maladie, je sais aussi, pour le vivre tous les jours, que je m’expose auprès de lui à un combat quotidien et peut-être à vie. Cet état de faits n’affecte en rien les sentiments que j’éprouve pour lui ni mon désir de faire notre vie ensemble et d’essayer par tous les moyens de le rendre le plus heureux et épanoui possible.
Et c’est dans cette merveilleuse optique que je me permets de vous appeler « A l’aide ! ! ! »
Comme je vous l’ai déjà exprimé lors de notre entretien téléphonique, je ne sais pas quoi faire pour l’aider, à part l’aimer très fort, le soutenir au maximum de mes possibilités.
Comment l’aider à lui trouver un objectif de vie et professionnel à sa portée, ou simplement un rythme de vie où il s’épanouisse?
Cette idée fixe du DAEU, lui pourrie la vie, même si je sais bien qu’aujourd’hui c’est çà et demain ce sera autre chose, mais comment l’aider à prendre une décision qui vienne vraiment de lui ?
Il sait très bien ce que je pense de ce diplôme, que c’est quelque chose qui lui tient à cœur, certes, mais dans lequel il s’enlise, en plus ce diplôme est fait pour les études longues, ce n’est pas à 28 ans que l’on peut s’engager la dedans et qu’il aura beaucoup de mal à les suivre.
Je lui est proposé une formation diplômante de courte durée dans le secteur de la Comptabilité, c’est sorti de son désir propre. Mais la décision lui appartient, il connaît ma position mais il sait aussi que , quoi qu’il choisisse, je serai toujours de son côté et à ses côtés. J’ai l’impression et il le sait, qu’il demande la « permission » pour l’arrêter sans culpabiliser.
Comment essayer de construire notre avenir ? Un avenir où il se sente le mieux possible ? sans se faire aider tous les 2 ( parce que l’on est deux sur ce coup là) j’avoue que, pour le moment, je ne vois pas très bien.
Où trouver sinon le bon chemin ou à défaut la route qui y mène.
Comment ne pas craquer quand vous voyez l’homme que vous aimez parler de suicide à tout bout de champs, quand vous le voyez s’enfermer dans une souffrance morale atroce et que vous êtes impuissante ?
J’ai très peur de le laisser seul à la maison quand je pars travailler le matin. Sa thérapeute m’a assurée qu’il ne passerait jamais aux actes, mais quelqu’un qui manifeste assez souvent des crises de désespoir on ne peut jamais être sûrs à 100% de ses réactions.
Il est tellement torturé, emprunt d’obsessions, d’angoisses qui le font paniquer et le rendre incapable de prendre une décision…
Il culpabilise de dormir et de grignoter toute la journée, de ne pas pouvoir se concentrer, travailler son diplôme, etc…
Il associe son apathie à de la paresse et un manque de volonté, alors que je sais que ce n’est pas le cas, comment le lui faire comprendre, pour dédramatiser et l’aider ?
D’ailleurs j’ai une autre question parallèle, comment peut – on contrer les effets du Zyprexa, à savoir cette fringale permanente (qui entraîne une prise de poids), son envie de dormir toute la journée et ses insomnies la nuit ? Dois je le faire suivre par un nutritionniste ou juste modifier son alimentation ? La relaxation, le yoga etc… peuvent – ils aider à améliorer son état ?
Comment lui redonner confiance en lui, lui démontrer quel trésor il a au fond du cœur ? qu’il est beaucoup plus cultivé et intelligent, que mes copains de fac qui avaient Bac+5 et que la valeur d’un homme ne se mesure pas à la valeur de son diplôme ?
Il culpabilise aussi pour l’AAH, en disant qu’il ne la mérite pas, j’ai beau lui dire que c’est une extension de ses soins pour l’aider à traverser au mieux cette période difficile et pour lui permettre de l’aider à s’insérer socialement , mais çà ne marche pas sur la durée, comment lui faire accepter ?
Comment l’aider à se socialiser d’avantage ? Il est tellement épanoui quand on est avec nos amis, il est paradoxalement très à l’aise à l’extérieur au milieu de personnes, dès que ses craintes que les gens puissent le juger ou découvrir sur son visage qu’il est malade, se sont dissipées…..
Je lui ai proposé de s’inscrire à un club d’échecs ou de faire de la danse de salon avec moi, c’est un bon défouloir et il y a dans ce cours des amis à nous, mais il ne veut pas, de peur d’être ridicule. Il refuse par exemple de faire un bowling parce qu’il a peur de perdre, alors qu’on y va juste pour s’amuser, cette phobie de l’échec est récurrente chez lui.
Comment l’aider, dans ces conditions, à s’occuper, parce que son ennui le fait « gamberger » dès qu’il n’a pas l’esprit occupé à autre chose, et çà le fait beaucoup souffrir ! ! !
Il a peur de notre avenir, il me demande fréquemment : « Ma chérie qu’est ce qu’on va devenir ? » ou il me dit aussi souvent, qu’il va me détruire la vie et qu’il m’aime tellement fort qu’il ne le supportera pas, que je mérite d’être heureuse.
J’essaye de le rassurer comme je peux, mes ces craintes sont très présentes.
Il a aussi très peur de ne pas pouvoir me faire d’enfants, de peur qu’ils n’aient ses « gènes » comme il dit. Et çà aussi çà le mine. Si on ne reste que tous les deux je ne lui en voudrais jamais, je le lui dis, mais comment le rassurer ?
Voilà vous avez sous les yeux l’épanchement d’un cœur qui souffre, pour la syntaxe, c’est certainement très décousu, çà démontre l’esprit confus dans lequel je me trouve aujourd’hui, veuillez m’en excuser.
Je suis consciente que vous êtes certainement très sollicité et avec un emploi du temps surchargé, mais j’aimerai vivement pouvoir vous rencontrer pour en parler et pour savoir comment vous le percevez aujourd’hui, si vous notez des changements, etc…
Même en semaine, j’arriverai sûrement à me libérer au niveau de mon travail.
Je suis également lucide sur le fait, bien sur, que si vous aviez la réponse à toutes ces questions T… ne serait pas au sein de votre établissement aujourd’hui, j’ai simplement l’espoir, peut-être utopique, que l’on en trouve quelques unes ensemble. Pour l’aider à être heureux malgré tout, parce qu’il le mérite vraiment.
En vous remerciant d’avoir pris la peine de me lire, je vous prie d’agréer, Docteur, mes sentiments les plus respectueux.
F.
P.S. T… est au courant que je vous sollicite un entretien, je lui est demandé son autorisation pour le faire, je ne lui cache rien, déjà parce que je pense que l’honnêté est un fondement important pour construire un couple qui marche et, à fortiori, dans son état il a besoin de savoir qu’il peut compter sur moi à 100% et me faire confiance, que je ne lui ferais jamais des cachotteries ou des choses derrière son dos et surtout contre sa volonté. C’est simplement une histoire de respect mutuel que l’on s’est juré d’observer.