ml1 (347 messages)
|
02-10-02, 15:55 (GMT)
|
14. "RE: Celui qui aide, soigne et ordonne" |
Bonjour, Isabelle, Depuis plusieurs jours, gros bogue sur mon ordinateur, enfin cela fonctionne ; Je n’ai pas eu le temps de lire tous les messages des uns et des autres, mais juste une réaction à celui-ci puisque cela fait 2 fois que vous abordez le problème. J’aimerais toutefois écrire en préambule qu’il n’y a pas selon moi de hiérarchie dans la souffrance. Il existe, bien entendu, des niveaux d’intensité dans la douleur ressentie (grand progrès de ces dernières années !) mais des échelles sur des critères de catégorie, de nature, sont inacceptables. Je pense que c’est pour cette raison que tout en étant très éloignée de votre maladie, je me sens si proche lorsque vous exprimez votre souffrance, votre parcours et je m’autorise donc à intervenir sur ce site. Lorsque vous racontez dans votre histoire, votre itinéraire médical/hospitalier, je vous ‘rassure’, il existe de grandes similitudes avec celui d’autres malades aux pathologies très différentes. Je reviens à vos lignes, je vais en choquer certains, peut-être le Dr Dupagne, mais je vous trouve bien complaisante. Je ne trouve pas plus d’excuse à un jeune praticien qu’à un jeune chauffeur routier. Peut-être qu’il fait trop d’heures (certains pour les internes), peut-être que son histoire, sa formation, etc, etc, mais il a choisi ce métier, contrairement à beaucoup d’autres, entre parenthèses. Lors de mes séjours à l’hôpital j’ai pu constater 2 types d’internes : ceux qui par tradition/décision familiale s’engageaient en médecine et les autres. J’ai deux expériences en mémoire avec des ‘spécimens’ de chaque catégorie : Un jour, je revenais dans ma chambre après avoir passé un examen pénible tant physiquement que moralement, l’interne entre, constate que je ne vais pas bien, s’assoit au bord du lit, et pour la première fois je m’effondre. Il me parle doucement, me raconte mon histoire, les doutes, les certitudes, les espoirs. Il restera plus d’une heure, me permettant enfin de cerner le problème, ‘ l’ ennemie’, au fil de la discussion, je prenais conscience que je pouvais à présent combattre, je pouvais trouver des armes. ( ensuite, les hurlements du chef de service qui le traitait de tous les noms pour m’avoir considéré comme un acteur lucide et responsable , il avait peur soi-disant, que je m’écroule, que je ne me batte pas… ).Une autre fois, ailleurs, je demande (je supplie…) ) à l’interne de garde d’augmenter la morphine (j’étais ‘au bout’ de ce que je pouvais supporter), il refuse, se réfugiant derrière le protocole fixé, il ne me voit pas, ne m’entend pas, il ne prendra pas d’autres avis, peur de déranger les supérieurs, je resterai des heures ainsi en attendant le chef de clinique qui immédiatement augmentera etc. Je me souviens de cette jeune chef de clinique qui tard le soir malgré ses jeunes enfants qui l’attendaient, tentait de me convaincre de rester à l’hôpital après un comportement odieux du chef de service. Je me souviens de cet autre chef de service qui me dit " on ne peut pas être et avoir été " et " il faut vivre avec votre douleur madame ". Mais aussi de celui qui passait le soir discuter de tout et de rien, de ceux qui ont tout tenté, m’accompagnant, m’écoutant, dans cette bataille. Je me souviens de services où de l’aide soignant au chef de service, on sentait du respect, de l’humanité, ils s’adressaient à moi comme à une femme dans sa globalité, je sentais qu nous étions tous associés dans un même combat où l’on me permettait de choisir. Je me souviens de ceux qui m’ont redonné de l’énergie lorsque j’avais envie de baisser les bras. Je me souviens aussi de ces services sordides où l’on vous infantilisait avec arrogance et presque perversité où l’on réduisait un ‘patient’ (je refuse cette appellation) au corps malade ou à une partie de celui-ci. D’une manière générale lorsque l’on est atteint d’une maladie, il vaut mieux être jeune (30/65 c’est parfait), avoir effectué des études supérieures, maîtrisé parfaitement le français, encore mieux, avoir des relations dans le monde hospitalier... J’oubliais, avoir la chance d’avoir des proches qui vous soutiennent dans votre combat contre la maladie. Ce n’est pas une histoire de trop d’heures etc, c’est une histoire d’Homme Un médecin peut dire qu’il est épuisé ou qu’il ne sait pas, (c’est aussi cela la confiance réciproque entre deux êtres humains) mais je ne tolère pas les attitudes qui enfoncent et isolent un peu plus le malade dans sa souffrance voir le culpabilise. Promenez vous sur l’autre forum, c’est atterrant le nombre de gens dont le médecin a posé un diagnostic sans expliquer, l’expression de tant de souffrances intériorisées. Je ne critique pas le système, je pense que nous avons l’un (voir le) des meilleurs systèmes de santé au monde, que nous avons une chance incroyable, j’ai vécu à l’étranger, je peux donc comparer. Mais, à chaque hospitalisation, lorsque je reçois ‘la chartre du patient hospitalisé’, je me dis qu’il y a eu une avancée très importante ces 10 dernières années mais que cela reste souvent au niveau de l’écrit, les malades et nombre du personnel médical n’ont pas encore intégré ces droits et devoirs. C’est très long, un peu fouillis, je m’en excuse. Amicalement Mary
|
Effacer |
Alerte |
Modifier |
Répondre |
Répondre en citant | Retour |
| |